
- Quelles sont les pressions de marché qui menacent la performance commerciale des délégués médicaux ?
- Quel avenir pour le métier de délégué médical ?
- Comment redonner du sens et des perspectives aux délégués médicaux et à leurs managers ?
Ce premier article présentera les pressions de marché qui menacent la performance commerciale des délégués médicaux.
Depuis près de 10 ans, les évolutions du secteur de la Santé transforment de manière significative les forces commerciales des laboratoires pharmaceutiques, du fait notamment de la réduction du nombre de médicaments commercialisables. On peut citer, à titre d’exemple :
- La concurrence accrue des génériques pour lesquels la part de marché augmente en Europe (26% en 2006 et 29% en 2016 en valeur), à l’exception de la France dont le marché des génériques est entré en récession en 2017 et ce malgré de larges campagnes gouvernementales auprès de la population pour en encourager l’adoption.
- Le passage de nombreux médicaments dans le domaine public (« falaise des brevets »), qui devrait se prolonger jusqu’en 2020, entraînant de facto la raréfaction des produits à vendre :
- Cette raréfaction des « blockbusters » nécessite de trouver de nouvelles opportunités de croissance. A ce titre, les laboratoires pharmaceutiques orientent la recherche vers le développement de molécules très spécifiques, rallongeant le temps de la recherche, ce qui réduit d’autant le nombre de médicaments rapidement commercialisables.
- L’augmentation significative des investissements nécessaires dans le domaine de la recherche et développement, tout comme le taux important d’échec en Phase 3, rendent également coûteux le développement et la commercialisation de nouveaux médicaments :
- En 2015, en France, le budget des laboratoires pharmaceutiques (autofinancement) dédié à la recherche correspond à 9,8 % du chiffre d’affaires des entreprises du médicament, contre seulement 4,8 % pour l’automobile (Leem, données de février 2018).
- Chris Viehbacher, PDG de Sanofi, résume les difficultés de l’investissement ainsi « Pour chaque euro dépensé en R&D, nous voyons revenir 70 centimes » .
- Le cadre réglementaire limite les opportunités de développement commercial. On peut citer à titre d’exemple :
- L’interdiction des investissements publicitaires, sauf dans le cadre des médicaments de type OTC (« Over the Counter ») pour lesquels les initiatives promotionnelles sont acceptées.
- Suite au scandale du Mediator, l’encadrement de la visite médicale s’est accru, avec notamment, en 2013, un décret sur la transparence des liens d’intérêts obligeant depuis les industriels de la santé et de la cosmétique à rendre publics les cadeaux distribués aux professionnels de santé ainsi que l’identité de ces derniers.
- L’obligation de justifier d’un intérêt réel pour le patient et d’une réelle amélioration en matière de qualité de vie. A ce titre, les procédures de mise sur le marché de nombreux médicaments sont ralenties. Cette obligation de résultat concret est également un frein au remboursement des médicaments mis sur le marché. A titre d’exemple, en France, le délai entre l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) et l’arrivée d’un nouveau médicament s’élève en moyenne à 500 jours contre 100 jours en Allemagne, au-delà des 180 jours exigés par la réglementation européenne .
De manière générale, l’ensemble de ces facteurs ont un impact significatif sur le chemin de l’innovation au malade, décrit comme « long (12 ans en moyenne), complexe et coûteux » (Leem).
Dans ce contexte, le métier de visiteur médical semble connaître une véritable « descente aux enfers » . En effet, les forces commerciales des laboratoires pharmaceutiques ont été soumises à des pressions particulièrement fortes, avec, à titre d’exemple, la réduction des effectifs de la visite médicale (passage de 23 000 en 2008 à 12 000 en 2016). En parallèle, les investissements consacrés à la visite médicale ont baissé de manière drastique :
- Entre 2003 et 2013, les investissements alloués à la visite médicale sont ainsi passés de 75 à 50 % de l’ensemble des dépenses promotionnelles, tandis que les effectifs de visiteurs médicaux ont chuté de près de 30 %.
- En 2008, 62,3 % du total des dépenses promotionnelles (3,185 milliards d’euros) étaient dévolus à la visite médicale. En 2016, cette dernière ne pèse plus que 38,3 % du même total, qui à cette date a chuté à 2,755 milliards d’euros .
Nous verrons prochainement comment, dans ce contexte, se dessine l’avenir pour le métier de visiteur médical.